Simple, touchante, drôle et vraie. Romane Bohringer est exactement comme on a envie qu’elle soit après avoir vu son film « L’Amour flou », qui fera la cloture du festival Focus On French Cinema le 30 avril au FIAF.
Sa comédie autobiographique, co-réalisée avec son ex-partenaire et le père de ses enfants Philippe Rebbot, raconte l’histoire d’un couple (Romane et Philippe, qui incarnent leurs propres rôles) qui se sépare et décide d’emménager dans deux appartements neufs mitoyens, qu’ils relient par la chambre de leurs enfants, Rose, 10 ans, et Raoul, 7 ans (eux aussi dans leurs propres rôles).
La raison pour laquelle on y croit : tout (ou presque) est vrai. « On a passé deux années assez tristes dans notre maison et, pour moi comme pour Philippe, la vision d’une séparation classique avec une garde alternée était un cauchemar. On bouge déjà beaucoup à cause de notre métier, on avait peur de ne plus voir les enfants. C’était une impasse », s’affole sa voix éraillée et envoûtante.
« Et puis un jour, il y a eu cette rencontre improbable avec ce promoteur immobilier – ça, c’est dans la vraie vie, hein – et cette histoire de “sépartement” qui tout à coup a illuminé notre horizon. Cette séparation devenait ludique, vertueuse, marrante. On partait, mais ensemble. Tout devenait une sorte de partage hyper beau, témoigne Romane Bohringer. Notre duo ne marche plus mais notre quatuor fonctionne très bien. »
C’est au moment de signer les papiers que les ex-amants voisins reçoivent des réactions mitigées de leur entourage. « Un jour on rigolait et quelqu’un nous a dit : “Il faudrait faire un film de cette histoire” », se souvient la fille de Richard Bohringer, qui a notamment joué dans « Les Nuits fauves » de Cyril Collard (pour lequel elle obtient le César du meilleur espoir féminin en 1992).
Aidé de leur ami Bertrand Mouly, directeur de la photographie, le couple se lance dans le film sur le chantier de leur futur appartement à Montreuil. Après l’intimité de ce tournage en petit comité, soit 26 jours étalés sur six mois au rythme des (vrais) travaux, le film passe sous les projecteurs du festival d’Angoulême.
« Je me souviens encore de ce 24 août à 9h du matin, mon film était présenté dans une salle de 500 personnes remplie à ras bord. J’étais en régie et j’ai entendu les premiers rires. J’ai ressenti une vague à l’intérieur, c’était inouï. J’ai encore du mal à en parler sans pleurer », s’anime la réalisatrice en passant une main sur ses yeux brillants.
Résultat : le film décroche le prix du public du festival. Quelques mois, une nomination au César pour le meilleur premier film et près de 200.000 entrées plus tard, « L’Amour flou » débarque à New York – « un truc de malade », bondit-elle, avant de reconnaître qu’elle n’a « aucune idée » de la réaction qu’aura le public américain. « Mais je pense que la séparation, c’est très moderne et occidental », souligne-t-elle. Son secret : « Il ne faut jamais oublier qu’on s’est aimé. »
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