Le noir total. Dès mardi 8 octobre, le courant a été coupé dans des centaines de milliers de foyers en Californie du Nord. Des coupures préventives en raison des feux de forêt, réalisées par l’opérateur privé Pacific Gas & Electric (PG&E), qui fournit en électricité 5,4 millions de clients du Golden State.
Comme on pouvait s’y attendre, cette mesure a entraîné une vague de critiques. Le gouverneur de Californie Gavin Newsom insiste notamment pour que ces mesures ne deviennent pas “la nouvelle norme”, reprochant à l’opérateur de ne pas avoir investi dans la modernisation de son réseau.
Pourquoi ne pas avoir enterré les lignes électriques (et notamment celles sujettes aux incendies) ? “C’est la réponse la plus logique et la plus sûre”, selon un éditorial de Slate. En effet, PG&E va le faire dans la ville de Paradise, ravagée par un incendie en 2018.
Certains avancent la crainte du Big One, le fameux tremblement de terre qui détruirait une partie de la Californie. Que nenni. La raison principale est son coût. Comme le notait le PG&E sur son site, l’installation de lignes électriques souterraines coûte au minimum 3 millions de dollars par mile (contre 800.000 dollars par mile pour des lignes aériennes). Et un rapport de l’Edison Electric Institute, intitulé “Out of Sight, Out of Mind, An Updated Study on the Undergrounding of Overhead Power Lines”, va plus loin, évoquant 5 millions de dollars par mile en zone urbaine. Les travaux nécessaires coûtent cher: creuser des tranchées, repaver les routes, prendre en compte les risques environnementaux dans l’installation…
Les compagnies électriques californiennes ne peuvent pas financer de tels investissements. Encore moins PG&E qui a déposé son bilan en janvier, ses équipements étant accusés d’être responsables de l’incendie baptisé “Camp Fire”, rappelle le New York Times. Seule solution : faire participer le contribuable. La California Public Utilities Commission (CPUC) estime que les résidents d’un quartier qui veulent des lignes électriques souterraines mettent la main à la poche eux-mêmes, en grande partie. Mais ce programme ne donne pas la priorité aux lignes situées dans les zones à risque élevé d’incendie, ce que veulent changer des résidents de Malibu et Rancho Palo Verde, rapporte The Desert Sun.
Le refus d’enterrer les lignes répond également à une question de temps : selon la CPUC, citée dans USA Today, il faudrait plus de 1 000 ans pour enterrer toutes les lignes. En effet, la Californie compte 25 526 miles (41 080 km) de lignes électriques à haute tension et 239 557 miles (385 529 km) de lignes de distribution ; et moins de 100 miles (161 km) de ligne peuvent être enterrées chaque année.
“Les préoccupations environnementales seraient également élevées si des milliers de kilomètres de tranchées étaient creusées dans des forêts ou des zones rurales”, expliquait Severin Borenstein, économiste expert en politique énergétique à Desert Sun. Pour lui, l’enfouissement des lignes pourrait avoir des points négatifs : les animaux peuvent mâcher les lignes et la foudre peut court-circuiter les connexions au sol. Une explication que reprend la société PG&E qui estime que “les lignes souterraines ne sont pas à l’abri des intempéries et sont vulnérables aux éclairs, inondations, tremblements de terre et aux dommages causés par les travaux de terrassement”. Sans compter que “les réparations sous terre prennent plus de temps”. La société préfère donc miser sur des coupures de courant préventives.
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