Depuis Rodez où il s’occupe de la mise en place de son musée qui ouvrira fin mai, il communique par Skype avec les journalistes présents à l’inauguration de l’exposition qui lui est consacrée aux galeries Dominique Lévy et Perrotin, qui sont établies dans le même immeuble sur Madison Avenue.
En effet, les oeuvres de 2012 à 2014 montrées dans cette exposition, “Pierre Soulages”, se situent dans le prolongement du courant «outrenoir » initié par l’artiste à la fin des années 70. « Pendant toute la première partie de mon oeuvre, le noir me servait d’élément de contraste avec d’autres couleurs » commente-t-il. Jusqu’à ce qu’il « rate » une peinture en 1979. « J’étais malheureux parce-que je pataugeais, se souvient-il. Comme je travaillais depuis plusieurs heures à quelque chose que je croyais mauvais (…) je suis allé dormir et une ou deux heures après je suis venu voir ce que je venais de faire. J’ai découvert qu’il y avait quelque chose qui allait très loin en moi, qui n’était pas le noir mais qui était la lumière réfléchie par les états de surface du noir ».
Dans les nouvelles oeuvres (dont certaines à double face) le noir est déposé en couches épaisses et travaillées. « Ces peintures sont complètement vivantes et jouent avec la lumière, commente Dominique Lévy. Elles reflètent la lumière et celle-ci vous est transmise par la peinture».
Quant à la couleur noire, Pierre Soulages se souvient qu’elle l’a toujours attiré : « Dès le début, lorsque j’étais enfant, on ne comprenait pas pourquoi lorsqu’on me donnait du vert je préférais tremper mon pinceau dans l’encrier d’encre noire. Ca surprenait tout le monde».
Le troisième étage est consacré à des oeuvres des années 50 et 60 où le noir côtoyait d’autres couleurs. Pierre Soulages n’avait pas été exposé aux Etats-Unis depuis 10 ans mais y avait été très présent, en particulier après la fin des années 40. «Non seulement il est venu ici, précise Dominique Lévy, mais la moitié de son travail jusqu’en 1976 a été vendue à de grands collectionneurs et musées américains ».
L’exposition coincide avec la sortie de Soulages in America premier livre consacré aux années américaines du peintre. Et on peut espérer qu’un jour, Pierre Soulages, artiste vivant français le plus reconnu au monde, ait enfin une rétrospective dans un grand musée américain. « L’exposition Pierre Soulages à Pompidou (en 2009) a attiré 500.000 visiteurs » précise Emmanuel Perrotin. En attendant, on peut commencer par aller découvrir la vingtaine d’oeuvres exposées sur Madison Avenue.