Pierre Comizzoli, le papa français des pandas de Washington

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Les scientifiques français expatriés aux Etats-Unis ne sont pas tous installés dans la Silicon Valley ou sur le campus du MIT. Spécialisé dans la reproduction des espèces menacées, Pierre Comizzoli a, lui, posé ses valises au cœur de la capitale fédérale : au National Zoo de Washington.
Cet ancien vétérinaire parisien a étudié à Maisons-Alfort, avant de basculer dans l’épidémiologie au Tchad. “Je suis arrivé à Washington en post-doc après mon PhD au Museum d’histoire naturelle à Paris. J’étais au départ juste visiting scientist, mais je ne suis jamais reparti“, explique-t-il, assis dans son bureau en plein coeur du zoo.
Depuis une quinzaine d’années, ce père de deux enfants (six et huit ans), désormais Américain et résidant à Capitol Hill, veille à ce que les animaux aient une descendance malgré leur captivité. Chose plus difficile pour les pandas du zoo – il y en a trois, un bébé et ses deux parents – que pour d’autres pensionnaires. « Le panda a une période de reproduction très courte, de dix jours. Mais en plus, il peut y avoir incompatibilité d’humeur entre le mâle et la femelle, et si le courant ne passe pas entre eux, ils peuvent en arriver à se battre, explique Pierre Comizzoli. On n’a jamais été bien sûrs que le mâle savait ce qu’il fallait faire avec la femelle, confie-t-il. Donc au bout d’un moment elle s’impatiente et ils deviennent agressifs… »

Mei Xiang lors d'une insémination artificielle (Mehgan Murphy/Smithsonian’s National Zoo)
Mei Xiang lors d’une insémination artificielle (Mehgan Murphy/Smithsonian’s National Zoo)

Les deux ursidés passent donc la période de reproduction séparés. Celle-ci s’avère au final plus intense pour les scientifiques que pour les animaux. « On ne veut pas manquer la fenêtre d’opportunité de dix jours alors, pour être sûr d’avoir un bébé, on les sépare et on a recours à l’insémination artificielle. »
Si la méthode n’est pas la plus simple, elle a malgré tout fait ses preuves. Tout en faisant chambre à part, Tian Tian (le mâle) et Mei Xiang (la femelle) ont, en 17 ans de vie commune, donné naissance à six petits. Trois ont survécu : Tai Shan est né en 2005, sa petite sœur Bao Bao en 2013 et le dernier, Bei Bei, il y a deux ans.
« Diplomatie du panda »
Malgré ces heureux événements, le zoo de D.C. n’a pas la garde des enfants puisque c’est la Chine qui est propriétaire de tous les pandas en captivité du monde. Ces derniers sont en effet prêtés dans le cadre de la « diplomatie du panda » de l’empire du Milieu, et leur descendance est retournée à la Chine après quelques années. Tout comme ses aînés, Bei Bei devrait donc bientôt prendre un aller simple vers le pays de ses ancêtres.
« Le deal, c’est que les pandas sont en location, on paye pour les avoir, mais on est aussi censés créer des programmes de recherche autour d’eux, sur la reproduction, la génétique, la médecine vétérinaire… », explique Pierre Comizzoli. Un travail scientifique à l’échelle mondiale qui paye puisque la Chine parvient désormais à réintroduire dans la nature des pandas nés en captivité. De plus, grâce aux politiques de protection, le panda n’est plus considéré comme une « espèce en danger » depuis 2016.
Quant à Tian Tian et Mei Xiang, leurs années à D.C. semblent comptées. « Ils arrivent dans leur vingtaine donc ça va être bientôt la fin au niveau de la reproduction », estime le scientifique français. Probablement remplacés dans quelques années, il ne leur reste plus beaucoup d’essais pour faire un petit quatrième. 2018, année de la réussite ?

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