Un violon transparent à la main, une femme joue la Marseillaise dans les allées du CES de Las Vegas. Et ce n’est pas n’importe qui. Lors de sa venue au salon, jeudi 5 janvier, la secrétaire d’Etat au numérique Axelle Lemaire a testé 3Dvarius, le violon électrique imprimé en 3D.
Habituée à ce genre d’événements, elle accompagnait le ministre de l’économie et des finances, Michel Sapin. L’événement concentrant une sur-représentation des médias propice à cette période préélectorale, le candidat républicain François Fillon a également fait le déplacement, avec l’ex-secrétaire d’Etat au numérique, Nathalie Kosciusko-Morizet. Certains ont également pu rencontrer Laurent Wauquiez, venu soutenir sa région Auvergne-Rhône-Alpes.
Les idées diffèrent mais pas leur objectif. En cette première journée du Consumer Electronics Show, les politiques ont tous été à la rencontre des jeunes entrepreneurs et des responsables de grands groupes, avant de prononcer un discours. La seule différence était leur agenda, qui leur a permis de ne jamais se croiser.
A la rencontre des startups françaises
Jeudi matin, dans les allées de l’Eurêka Park, qui concentre les jeunes pousses prometteuses, les deux ministres du gouvernement Hollande sont au pas de course, enchaînant les stands de startups de la French Tech. Plus connectée que son ministre, Axelle Lemaire est d’ailleurs rompue à ce type d’exercice : «ce n’est pas mon premier CES».
Au détour des allées, ils découvrent le robot Buddy, la D-Vine, la nespresso du vin ou encore le pommeau de douche intelligent, Hydrao. «J’en ai profité pour évoquer les problèmes rencontrés pour la certification plomberie hors France», explique Gabriel Della-Monica, l’inventeur d’Hydrao. «Ségolène Royal leur avait parlé de nous, elle est fan.» Pas le temps d’épiloguer que les ministres repartent. Et ils ont donné de leur personne : chantant «Singin’ in the rain» sous le parapluie connecté oombrella, et Axelle Lemaire chaussant les gants de boxe… “On apprécie le soutien des politiques. C’est un porte-drapeau pour nos équipes“, reconnaît Thibaut Jarrousse, l’un des fondateurs de 10-Vins.”L’an passé, Emmanuel Macron s’était arrêté. Cette médiatisation a accéléré notre campagne de crowdfunding (financement participatif). On a récolté les fonds quatre fois plus vite que l’année précédente.”
C’est aussi l’occasion d’alerter les politiques. Jerôme Leleu, le co-fondateur de Simforhealth, qui met la réalité virtuelle au service des professionnels de la santé, a notamment profité de sa rencontre avec le ministre pour évoquer les difficultés d’accès aux marchés publics à l’international.
Outre les sourires, Axelle Lemaire et Michel Sapin sont venus défendre les startups et l’initiative French Tech, créée en 2013. «Il ne faut pas douter. En France, nous avons des innovateurs, nous sommes un pays qui va de l’avant», clame Michel Sapin. Preuve de cette effervescence, «le nombre de startup a été multiplié par quatre en 3 ans », appuie Axelle Lemaire. La campagne n’étant jamais loin, ils en ont profité pour faire le bilan du quinquennat. «Pour accompagner les initiatives, des mesures ont été votées, telles que la baisse de l’impôt sur les sociétés et la création de Bpifrance, l’agence publique de financement des entreprises», rappelle le patron de Bercy, émerveillé par la diversité des innovations.
Fillon, le candidat geek
Mais la vraie star du CES, venue marcher sur les plates-bandes d’Emmanuel Macron qui avait été ovationné en 2016, fut François Fillon. Au pas de course et suivi par une horde de journalistes, il a lui aussi enchaîné les stands. Le candidat avait revêtu son costume de geek, essayant notamment chez Sculpteo le premier vélo imprimé en métal. A ses côtés, son ancienne adversaire à la primaire Nathalie Kosciusko-Morizet se défendait de miroiter une place de ministre.
Après une journée riche en serrages de main, il a prononcé un discours devant une foule de professionnels français. «Je ne suis pas ici pour sacrifier à une mode», s’est-il d’abord justifié, refusant la comparaison avec Emmanuel Macron. Il a alors remémoré à l’assistance son passé numérique. «Je suis un converti de longue date à la révolution numérique (…) Je pressentais l’importance d’Internet quand d’autres n’y voyaient qu’un gadget éphémère», arguait celui est “venu au CES pour la première fois en 1999“. Son amour pour le tech a alors égaillé son discours : «le pétrole du XXIe siècle, c’est la data». Pour offrir «un environnement business friendly» et «faire de la France une smart nation», il mise sur des mesures, telles que la suppression de l’ISF, une “flat tax” de 30% sur les revenus du capital, un dégrèvement fiscal pour les investissements dans les entreprises et la création d’un statut de prestataire indépendant. Des annonces ovationnées par l’assistance.
Mais les grands discours ne bernent pas les entrepreneurs. Même s’il se réjouit de la visibilité offerte par les politiques, Matthieu Régnier, le co-fondateur de Dagoma (imprimante 3D), est nuancé : “je ne sais pas s’il y a une réelle écoute technique. C’est davantage un enjeu politique, d’autant plus pour François Fillon, qui a posé de nombreuses questions.” D’autres startups regrettent que leur innovation n’ait pas mérité l’intérêt des ministres et du candidat. “C‘est bien dommage que le handicap soit une niche car ce n’est pas un gadget“, déplore Pauline Bouleroy, venue présenter Gaspard, le tapis connecté installé sur un fauteuil roulant.
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