Emmanuel Macron semble bien décidé à faire revenir les Français de l’étranger en France. Devant l’Assemblée des Français de l’étranger, composée de représentants de Français établis hors de France, le président de la République a exposé, lundi 2 octobre, “la série de transformations” qu’il veut mettre en oeuvre pour redonner la “fierté” de la France à sa diaspora.
“Je ne veux plus que la France, on en parle à l’étranger, simplement en expliquant pourquoi on l’a quittée ; je veux que les Françaises et les Français qui vivent à l’étranger expliquent pourquoi ils ont envie d’y revenir, pourquoi ils sont fiers de leur pays et en quoi ils portent sur le domaine du numérique et de l’environnement une excellence française qui se regardera partout avec envie !“, a-t-il expliqué.
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La déclaration s’inscrit dans la lignée de son discours devant la communauté française de New York, en septembre, pendant lequel il avait lancé un “revenez !” qui avait fait sourire dans la salle. Il avait toutefois compensé cet exhortation en ajoutant que le gouvernement ferait le nécessaire pour soutenir l’éducation française à l’étranger pour ceux “qui veulent rester là“.
“C’est une vision étriquée. Je ne me reconnais pas dans cela. Beaucoup de Français de l’étranger ne s’y reconnaissent pas“, a critiqué Yan Chantrel (PS), conseiller AFE à Montréal.
“C’est une logique très franco-française. Il y a chez lui malgré tout l’idée qu’il n’y a pas de raison de ne pas vivre hors de France. Mais ce n’est pas uniquement le cas de Macron. Tous les politiques français le disent aussi“, tempère le conseiller AFE Olivier Piton (LR).
L’intervention du président, la première d’un locataire de l’Elysée en personne au siège de l’AFE, intervenait dans un contexte d’inquiétude autour de l’annulation de crédits budgétaires affectant les missions du Quai d’Orsay et la suppression de la réserve parlementaire, poumon financier pour de nombreuses associations en dehors de France. Plusieurs groupes politiques ont d’ailleurs interpellé Emmanuel Macron en lui posant des questions par l’intermédiaire du président de l’AFE, Marc Villard, avant son discours.
Voici les points à retenir de son discours:
- Vote par Internet: suspendu pour les élections législatives de 2017 par le précédent gouvernement pour des raisons de sécurité du vote, le vote électronique est un sujet sur lequel Emmanuel Macron est attendu. “Si nous ne sommes pas en capacité pour les prochaines élections de nous organiser pour avoir un système de vote étanche à toute attaque, ça ne s’appelle plus la France, notre pays !“, a-t-il dit. Il a souhaité qu’une “solution parfaitement sécurisée” soit mise en place pour les prochaines élections consulaires de 2020, “et sur cette base, toutes les améliorations qui seraient indispensables puissent être conduites pour que lors des législatives de 2022, il n’y ait plus aucun débat”.
- Annulation de crédits: La décision de Matignon d’annuler des crédits relatifs aux Français de l’étranger pendant l’été a suscité une levée de boucliers chez plusieurs élus des Français de l’étranger, inquiets des répercussions de ces coupes sur les bourses scolaires et les moyens de promotion culturelle de la France à l’étranger. Le président s’est montré ferme, parlant de “schizophrénie française“: “Alors je sais que toutes les coupes budgétaires font toujours grincer des dents mais toujours pour réduire des dépenses, je suis sûr qu’il y a une majorité d’entre vous qui étiez durant cette campagne pour baisser les dépenses publiques mais on n’est jamais pour les baisser quand ça nous concerne, c’est la schizophrénie française, mais on va devoir un peu le faire collectivement parce que nous avons 10 points de produit intérieur brut supérieurs à la moyenne de l’Union européenne et de la zone euro !“
- Suppression de la réserve parlementaire: le président a pris ses distances avec cette mesure – “c’était un choix du Parlement“. Il a appelé à la mise en place d’un “dispositif permettant d’accompagner le tissu associatif des Français de l’étranger”. “Nous devons avoir là un principe de justice, je sais que pour beaucoup d’associations que vous souteniez et que les parlementaires accompagnaient, la réserve était un élément important et donc nous devons regarder là-dessus comment créer avec le Quai un dispositif comparable et que les ministres puissent instruire cela en lien avec vous-même et les parlementaires“.
- Développement de l’éducation française: le locataire de l’Elysée veut être dans “une stratégie de conquête de l’enseignement du français” à l’étranger. Les crédits de l’AEFE (Agence de l’Enseignement du Français à l’étranger) “seront préservés à partir de 2018“. “Nous devons massivement au travers du réseau des écoles et des alliances aider à développer l’enseignement du français par tous les moyens, y compris le digital – et le ministère s’est engagé dans un très gros travail sur ce sujet et je souhaite que les MOOC puissent être développés et viennent en appui des méthodes pédagogique“.
- Make The Planet Great Again: après l’annonce de Donald Trump de se retirer de l’Accord de Paris sur le climat, Emmanuel Macron avait lancé un appel aux scientifiques américains à venir en France pour “Make the Planet Great Again”, allusion au slogan de campagne de Donald Trump “Make America Great Again”. Devant l’AFE, il a affirmé que cet appel fonctionnait. “Je peux vous dire que cet appel fonctionne et nous allons redevenir dans les prochains mois, les prochaines années, un pays qui, sur ce sujet, rayonnera, attirera les meilleurs talents, sera un exemple et que cet exemple doit être promu“.
Olivier Piton a salué un “discours encourageant, positif. Il a montré son intérêt pour les Français de l’étranger et leur représentant“, mais il aurait voulu le voir s’adresser aux Français hors de France plus tôt. “Il a fallu attendre son discours à Athènes en septembre, rappelle-t-il. On a sans doute attendu longtemps“.
Pour Yan Chantrel, c’est “une bonne chose” que le président ait pu s’adresser à l’AFE, mais l’élu de gauche, ancien candidat à la législative en Amérique du Nord, fustige notamment ses déclarations sur les coupes budgétaires. “Il assume une politique d’austérité que nous combattons, dit-il. Il y a deux poids deux mesures entre son discours sur la France qui a vocation à rayonner et les coupes dans les moyens“.