Il était une fois, ma petite maison d’édition numérique

Il était une fois, ma petite maison d’édition numérique

Par Noémie Taylor / Le 14 août 2012 / Actualité

Il y a un an, Flore Geffroy-Kearley reçoit pour son anniversaire un Kindle. Elle est loin d’imaginer que la petite tablette électronique va la transformer en directrice de maison d’édition. Grande dévoreuse de livres devant l’éternel, cette journaliste française qui vit à Spring Valley près de San Diego, depuis 15 ans, est « frustrée comme beaucoup d’expatriés, de ne pouvoir trouver facilement et à des prix raisonnables » les dernières nouveautés en français qui l’intéressent sur Amazon.com.

« En recevant le Kindle, j’étais emballée ! Mais j’ai vite déchanté. Il y avait 5000 livres en français, pour la plupart des classiques et des best-sellers, qui ne m’intéressaient pas, et en plus, au même prix que le papier ! ». Elle remarque aussi quelques ouvrages mis en ligne par des écrivains auto-édités. Mais à leur lecture, elle est effondrée. «La plupart des bouquins étaient vraiment de piètre qualité, truffés de fautes d’orthographe … Je me suis dit, puisque c’est comme ça, pourquoi ne pas créer ma propre maison d’édition numérique ? »

Efficacité américaine

Son but : ne « pas publier des Prix Goncourt, mais des livres de qualité, qui méritent d’être édités et n’ont jamais pu trouver preneur auprès d’éditeurs classiques, par peur de la prise de risques financière». En trois mois, le projet de Flore Geffroy-Kearley est lancé. «J’ai monté une structure de type «Do Business As», sorte de compte d’auto-entrepreneur par le biais duquel, mes impôts me sont directement prélevés, en tant que particulier (ndlr : et non en tant qu’entreprise, dont la création aurait engendré un certain nombre de frais plus importants). Après avoir déposé la marque Le Gaulois Nomade et annoncé la naissance de mon projet dans un journal local (une des formalités requises), je me suis créé un compte tout bête sur Kindle, avec un numéro d’identifiant, grâce à mon Tax ID Number. Simple et rapide : une vraie création d’entreprise à l’américaine. « L’idée, c’était vraiment, je me lance et je rectifie le tir au fur et à mesure. En France, c’est l’inverse. On peut attendre des années avant de lancer une idée qu’on a passé du temps à perfectionner et à l’arrivée, quand on se décide enfin, on a trois ans de retard ! Les éditeurs français sont d’ailleurs vraiment à la traîne en matière de numérique !».

Elle fouille ensuite dans son carnet d’adresses, à la recherche d’auteurs dont, pour certains, elle a lu la prose et aimé les manuscrits. «Maintenant, des auteurs me contactent directement via mon site Internet et m’envoient leurs écrits. J’ai monté un petit comité de lecture composé de profils très différents, un peu partout dans le monde».

Plus de 90 éditeurs francophones pure-players dans le monde

En tant que lectrice, Flore Geffroy-Kearley, n’est pas prête à payer plus de 5 $ pour un livre numérique. Le prix des ouvrages édités par Le Gaulois oscille donc en général entre 1.99 et 2.99 dollars. «Trente pourcent des recettes est déjà ponctionné par Amazon. J’ai fixé les droits d’auteurs à 35%, ce qui est beaucoup plus que les droits accordés par les éditeurs papier ». Pas de quoi faire fortune dans l’immédiat. « Ce n’est pas vraiment le but. L’idée, c’est de s’installer dans le temps. L’avantage de l’édition numérique, c’est que contrairement au papier, je ne suis pas soumise aux objectifs de vente ni aux contraintes de temps. Je n’ai pas les mêmes coûts qu’un éditeur « normal » et donc rien à perdre financièrement. Cela me donne une plus grande liberté dans mes choix éditoriaux».

Le concept de maison d’édition « pure-player » a d’ailleurs le vent en poupe. Lorenzo Soccavo, chercheur en prospective du Livre et de l’Edition a ainsi récemment recensé 92 éditeurs francophones de la sorte dans le monde. « Nous sommes en train de monter une alliance des éditeurs pure-players francophones pour nous faire connaître, explique Flore Geffroy-Kearley. L’idée de notre secteur, c’est d’être un filtre qui offre une garantie de qualité aux lecteurs, ce que ne peut pas faire l’auto-édition».

Parmi les 100 meilleures ventes d’Amazon.fr

Et petit à petit, Le Gaulois Nomade fait son nid. Seize titres (du roman historique au polar, en passant par le recueil de nouvelles), sont désormais disponibles à la vente. « En octobre, je vendais 20 livres par mois. En novembre, 40, en décembre, entre 110 et 130. Et ce mois-ci, je dépasse la barre des 200 ! Cela peut paraître ridicule, comparé aux ventes de maisons d’édition classiques… Mais tout ceci reste très artisanal et limité à une seule plate-forme, Amazon ». Zéro publicité, à part Facebook et le bouche à oreille. Avec Sept mètres de Soie (un coup de cœur qu’elle a eu pour le roman d’une amie que celle-ci n’a jamais réussi à faire publier en dix ans), Le Gaulois Nomade a été propulsé en tête des 100 meilleures ventes d’Amazon.fr. « Arriver trois places devant Marc Lévy ou Katherine Pancol, en version numérique, avouez qu’il y a de quoi être fière !»

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