GPA, PMA, adoption : les filiations entre les États-Unis et la France

GPA, PMA, adoption : les filiations entre les États-Unis et la France

Par Sophia Tamimy / Le 12 juin 2019 / Immigration

(Article partenaire) Les nouvelles filiations telles que la GPA et la PMA, l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels et le développement des coparentalités font naître de nombreuses interrogations sur le plan juridique, a fortiori dans un contexte international.
Un point s’impose sur les principales questions que peuvent se poser les parents ou futurs parents ayant des liens avec les États-Unis et la France*.
Si, en France comme dans la plupart des Etats américains, la filiation est principalement établie par lacte de naissance ou la reconnaissance par lun des parents, cette dernière peut être préalable à la naissance en France mais ne peut qu’être postérieure à la naissance dans beaucoup d’États américains. Cest une des nombreuses différences auxquelles il faut prêter une attention particulière en tant que Français expatrié aux États-Unis.
Le lien de filiation est important car il a des conséquences juridiques primordiales. Il crée des droits et devoirs réciproques entre parents et enfant, notamment le droit de porter le nom, le droit dhériter, ou encore le droit dexercer lautorité parentale sur lenfant mineur. Il permet également de transmettre la nationalité, ce qui est particulièrement intéressant pour les parents ayant des liens avec la France et les États-Unis.
Dun point de vue biologique, un enfant ne peut avoir que deux liens de filiation, lun paternel et lautre maternel. Avec lapparition de la GPA (« gestation pour autrui ») et de la PMA (« procréation médicalement assistée »), se pose la question de la possibilité d’établir un acte de naissance ou un acte de reconnaissance ne correspondant pas au lien biologique.

La gestation pour autrui

En France :

La GPA est contraire à lordre public et strictement interdite. En cas de recours illégal, aucun lien de filiation ne pourra être établi y compris à l’égard du père biologique, et des poursuites pénales seront encourues.
Quant aux GPA réalisées à l’étranger, la France leur refusait initialement tout effet, y compris en terme d’établissement de la filiation. Il était donc impossible de faire transcrire sur les registres de l’état civil français lacte de naissance dun enfant né à l’étranger à lissue dune GPA. La multiplication du nombre denfants nés de GPA à l’étranger, et plusieurs condamnations de la Cour européenne des droits de lhomme, ont conduit les juridictions françaises à assouplir leur position, notamment en 2015 et 2017.
Actuellement, la Cour de cassation accepte la transcription de l’acte de naissance d’un enfant né d’une GPA à l’étranger lorsqu’il correspond à la réalité biologique.

Ainsi, si lacte de naissance étranger mentionne le père biologique et la mère biologique ayant porté lenfant, la France acceptera sa transcription.  En revanche, si la mère sur lacte d’état civil étranger est la mère dintention et non la mère ayant porté lenfant et accouché, seule la filiation paternelle sera reconnue par l’état civil français. Lautre parent dintention, homme ou femme, pourra alors adopter lenfant de son conjoint, par lintermédiaire dune procédure française simplifiée mais ouverte aux seuls couples mariés.
Bien que la Cour européenne des droits de lhomme ait validé cette position par avis du 10 avril 2019, une évolution est à prévoir. En effet, le Tribunal de grande instance de Nantes, compétent pour la transcription des actes de naissance étrangers, fait de la résistance et a accepté, en 2019, la transcription dun acte de naissance étranger mentionnant la mère dintention, sans que cette dernière nait à passer par le processus de ladoption; un recours est à prévoir.
La question reste également en débat en France dans le cadre de la révision à venir de la loi de bioéthique. Actuellement, le Comité national d’éthique reste opposé à ladmission de la GPA sur le territoire français, et les questions suivantes restent en suspens concernant les GPA pratiquées à l’étranger :
– Que faire si la mère dintention est la mère génétique de lenfant même si elle ne la pas porté?
– Doit-on ouvrir la procédure dadoption simplifiée de lenfant du conjoint aux couples non mariés?

Aux Etats-Unis :

En labsence de réglementation de la GPA (« surrogacy ») au niveau fédéral, la réglementation diffère en fonction des États.
Cependant, le Uniform Parentage Act (UPA) prévoit un cadre uniforme admettant la GPA qui peut être adopté par les États ou, du moins, orienter leur réglementation avec notamment :
– La possibilité de reconnaissance de la filiation pour les couples de même sexe
– La possibilité d’établir la filiation non-biologique entre le parent de fait (celui qui soccupe de lenfant) et lenfant, à limage de la possession d’état française
– La Gestation pour autrui ou surrogacy

Concernant la GPA, le UPA reconnaît depuis 2002 tant la traditional surrogacy(avec lien génétique) que la gestational surrogacy(sans lien biologique), considérant que la GPA est ouverte à tout majeur de 21 ans.
Dans le cadre de la gestational surrogacy les parents dintention sont considérés parents légaux par opération de la loi, dès lors que le contrat de surrogacyest valide.  A linverse, les parties à un contrat de traditional surrogacy sont tenues de se présenter devant le juge, qui valide les termes du contrat.
En cas de traditional surrogacy, la mère porteuse dispose dun délai de 72 heures après la naissance pour changer davis tandis quen cas de gestational surrogacy, le contrat de surrogacy est exécutoire à partir du moment où le transfert dembryon est intervenu, et la mère porteuse ne peut plus changer davis.
À ce jour, 48 États et le District of Columbia autorisent la GPA rémunérée (compensate surrogacy). New York, la Louisiane, et le Michigan linterdisent toujours.
À New York, la GPA est autorisée tant pour les couples que pour une personne seule, à la condition quelle soit compassionate, cest-à-dire que les fonds versés à la mère porteuse correspondent uniquement à la prise en charge de ses frais et non à une véritable rémunération.
En toute hypothèse, les GPA pratiquées dans un État sont reconnues sans difficulté dans les autres États américains.

La procréation médicalement assistée

En France :

La PMA est actuellement ouverte aux seuls couples hétérosexuels infertiles et doit être gratuite.
Dans le cadre de la révision de la loi bioéthique censée intervenir en 2019, louverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes célibataires est prévue.
Les PMA pratiquées à l’étranger sont susceptibles d’être reconnues en France et ladoption dun enfant né dune PMA est ouverte au conjoint, la Cour de cassation ayant émis un avis en ce sens sans que la jurisprudence ne soit clairement fixée.

Aux États-Unis :

La PMA est ouverte à tous et payante (avec reasonable compensation, le prix étant compris entre 10.000$ et 15.000$ en moyenne) et pour les couples homosexuels, le nom des deux mères peut être inscrit sur lacte de naissance, quelles soient mariées ou en concubinage (vrai dans 11 États) ou uniquement en cas de mariage (vrai dans 39 États).
Qualifiée de ART (Artificial Reproductive Technique), elle consiste dans 99% des cas dans des fécondations in vitro. Depuis la première fécondation in vitro en 1981, le nombre de recours aux États-Unis na cessé de croître, pour atteindre environ 4 millions de naissance par fécondation in vitro en 2012, soit 1 à 2% des naissances.

Ladoption

En France :

Ladoption est ouverte aux couples homosexuels mariés depuis le 17 mai 2013, date à laquelle le mariage homosexuel a été reconnu en France.
L’époux de même sexe que le parent biologique dun enfant peut adopter cet enfant, si la filiation de ce dernier nest pas établie à l’égard de son second parent biologique.
Depuis un arrêt de la Cour de cassation du 5 juillet 2017, ladoption est également ouverte, comme évoqué ci-dessus, aux couples ayant eu recours à la PMA ou la GPA.
L’existence d’un mariage est une condition pour l’instant maintenue, mais louverture aux couples non mariés est à envisager dans lavenir, au regard de la position récente de la Cour européenne des droits de lhomme.

Aux États-Unis :

Dans tous les États des U.S, ladoption est ouverte aux couples, hétérosexuels comme homosexuels (notons toutefois que les lois de 42 des Etats américains ninterdisent pas formellement la discrimination selon le sexe et le genre, 10 autorisant même les agences dadoption à refuser ladoption par un couple homosexuel en se fondant sur des motivations religieuses).
Selon les États en revanche, il sera requis que le couple soit marié ou en union stable. À lexception de ladoption par le beau-parent (stepparent adoption) ou par le concubin du parent  (second-parent adoption), autorisées dans 15 États dont la Californie, Washington D.C. et l’État de New York, ladoption met fin aux droits et responsabilités du parent biologique sur lenfant et ses biens.
Si ladoption était traditionnellement closed, lenfant nayant aucun lien avec ses parents biologiques, depuis les années 1980, les juridictions américaines valident l’“open adoption, processus permettant aux parents biologiques de garder un lien affectif avec leur enfant, par des échanges avec les parents adoptifs et/ou des visites auprès des enfants, selon les termes du contrat conclu entre les parents.
La Convention de la Haye du 29 mai 1993 :
Les États-Unis et la France ont ratifié une convention internationale permettant la reconnaissance automatique des décisions dadoption prononcées par un État membre dans lautre. Il faut veiller à respecter en préalable de ladoption les conditions et la procédure prescrites par cette convention qui met en place un mécanisme de collaboration entre autorités centrales. À défaut, il faut être particulièrement vigilant sur les adoptions prononcées aux États-Unis.
En effet, il est fréquent que les adoptions prononcées aux États-Unis soient open et ne rompent pas le lien avec les parents biologiques.  En conséquence, elles risquent de ne pas être reconnues en France comme adoptions plénières, seule possibilité de transmettre la nationalité.
Lorsqu’établir un lien de filiation nest pas possible, il existe malgré tout des possibilités de créer un lien juridique entre un enfant et un tiers.
Ces dispositifs peuvent intéresser les couples en projet de coparentalité (deux couples homosexuels ou deux célibataires partageant un désir denfant) ou bien le tiers non parent qui souhaite maintenir un lien avec lenfant de la personne dont il se sépare.
En conclusion, il est vivement recommandé denvisager toutes les conséquences juridiques sur la filiation ou les liens avec un enfant avant tout projet de GPA, PMA, ou d’adoption, a fortiori dans un contexte mêlant lordre juridique français et américain.
Pour en savoir plus et bénéficier de conseils d’experts, contactez Hélène Carvallo et Anne-Carole Plaçais, avocates aux barreaux de New York et Paris, spécialisées en droit international de la famille.

* Hélène Carvallo est avocat inscrit à New York, les informations données dans cet article sur les autres États américains ne constituent pas des informations légales et doivent être vérifiées auprès dun conseil local.

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Note: les “articles partenaires” ne sont pas des articles de la rédaction de French Morning. Ils sont fournis par ou écrits sur commande d’un annonceur qui en détermine le contenu.

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