L’atelier aménagé dans le garage de sa maison de San Gabriel ressemble à ceux des maisons de haute couture parisiennes. Au milieu trône une très grande table blanche sur laquelle traîne nombre de tissus colorés, en face l’énorme imprimante à patron, et l’indispensable machine à coudre juste à l’entrée, pour profiter pleinement de la lumière californienne.
Depuis 2019, Orélie Varnier confectionne des pièces haute couture et de prêt à porter pour la marque OV Paris qu’elle a créée peu avant de déménager à Los Angeles. Chemise en soie, tops en dentelle, body en velours, robes en sequins, manteau en cachemire… Les collections de la créatrice de mode de 37 ans cherchent toujours à allier le confort à l’élégance. Mais son best-seller, ce n’est pas un modèle mais une matière : le tweed. Toutes ces clientes californiennes ne jurent que par ça. « Le tweed, c’est Chanel, c’est le must ! »
Orélie Varnier le maîtrise à la perfection pour avoir passé nombre d’années à le travailler chez Chanel, en tant que couturière. Si elle a également fait ses preuves chez Dior, Vuitton et Lanvin, celui qui lui a mis le pied à l’étrier c’est « Monsieur Cardin », comme elle l’appelle toujours des années plus tard avec le même respect. « J’avais 16 ans quand j’ai pris le train pour aller à Paris avec ma tante faire le tour des maisons de couture, mes dessins et cv sous le bras. Je suis repartie avec un stage pour les prochaines vacances scolaires. »
Les vacances scolaires en stage chez Cardin
Une opportunité qui va lui permettre de réaliser son rêve. « Mes parents ne voulaient pas que je fasse couture car ils n’étaient pas très rassurés par ce milieu. Du coup, je me suis retrouvée à faire un BAC Pro comptabilité gestion, je m’ennuyais terriblement. »
Pendant son temps libre, à Changé, dans la Sarthe où elle grandit, l’adolescente continue de noircir des cahiers entiers de ses dessins. Une passion née enfant lors des balades dominicales en famille sur les Champs-Elysées. « Dès 5 ans, j’ai su que je voulais travailler dans la mode. J’étais émerveillée devant les vitrines des grands couturiers, ça me faisait rêver. J’admirais les femmes essayer leurs robes magnifiques, et je me disais : moi aussi je veux rendre les femmes belles. »
Pendant plusieurs années, la jeune fille apprend ses bases à chaque vacance scolaire qu’elle passe en stage chez Pierre Cardin. « Un jour, il est venu me voir, j’avais 21 ans, j’étais alors en BTS d’assistante de direction. Il m’a regardé et m’a dit : vous allez arrêter vos études et je vais vous payer votre école de stylisme. Et c’est ce qu’il a fait. » Un an plus tard, « le 30 août 2007 », Orélie, qui poursuit son apprentissage en alternance au sein de la maison de haute couture, est de nouveau appelée par le designer. « Il était dans son bureau et m’a demandé : ‘Vous voulez travailler ici ? Alors signez ici votre CDI. On arrête l’école !’ » Pendant plus de six ans, Orélie apprend tout, la haute-couture, le prêt-à-porter, la mode masculine, et celle féminine. « Monsieur Cardin voulait absolument que je sois capable de créer ce que j’avais dans la tête. »
L’influenceuse aux 3 millions d’abonnés
En 2014, avec son compagnon de l’époque et l’aval du couturier, elle se lance. Après un défilé et une expérience en Chine, elle rentre sur Paris, et décide de repartir à zéro. Toutes les grandes maisons se l’arrachent pendant plusieurs années, mais l’envie de LA est plus forte. « Je rêvais de vivre en Californie depuis toute petite. Un jour, j’ai osé. » Ou plutôt, ils ont osé. C’est en famille, avec son mari et sa petite fille d’alors un an et demi, qu’ils arrivent aux États-Unis en juillet 2019, l’envie d’habiller les Californiennes des tenues d’OV Paris, « des classiques français revisités de manière moderne », chevillée au corps.
La rencontre avec Lilly Ghalichi, une avocate businesswoman aux 3 millions d’abonnés sur Instagram, va changer la donne. Lors d’un shooting de l’influenceuse, grâce à la photographe qu’elle connaissait, la styliste arrive avec deux tenues qu’elle a conçues exprès pour la jeune femme et sa fille. « J’avais tout mis dans des boîtes, comme chez Chanel. Elle a adoré. »
Depuis, Lilly lui commande régulièrement des pièces, et lui présente des amies (Shiva Safai et Leyla Milani entre autres), qui se laissent aussi tenter. « Ce que j’adore avec les Californiennes, c’est qu’elles sont très ouvertes aux nouveaux créateurs et ont envie de soutenir ceux dont on parlera demain. »
Et des idées pour demain, Orélie Varnier en regorge : « Je suis en train de concevoir des casquettes en tweed, et je travaille également sur des tenues sportswear. Sans oublier la collection prêt-à-porter de l’été prochain. » Un emploi du temps chargé, qui va l’être encore plus d’ici deux mois : un petit garçon viendra au printemps agrandir la famille.
Photo en tête de l’article : La créatrice de mode Orélie Varnier, dans son atelier à Los Angeles © OV PARIS