« J’ai une double vie ». C’est en ces termes que Marie-Agathe Charpagne se présente. Cette Française de 27 ans a débarqué à Santa Barbara au mois de février 2017 pour vivre son « rêve américain » : non pas une, mais deux carrières.
Chercheuse en métallurgie à l’université de Santa Barbara (UCSB) de jour et pianiste concertiste membre de l’orchestre Ensemble for Contemporary Music de nuit (ou presque), cette grande rousse à la voix calme donnera son prochain concert le 30 mai à 5:30pm sur le campus de l’université au Lotte Lehmann Concert Hall, après une journée de travail à manipuler des matériaux à très hautes températures.
Son « coup de foudre pour les Etats-Unis » a eu lieu en septembre 2016. En l’espace de dix jours, la doctorante et pianiste diplômée du conservatoire de Saint-Etienne et de l’Académie de musique Rainier III à Monte-Carlo, est invitée à jouer un récital en Virginie, puis à présenter une conférence en Pennsylvanie lors d’une grand-messe de la métallurgie. « Les professeurs émérites dont je lisais les livres à l’école étaient assis au premier rang », se souvient-elle, transportée.
Parmi eux, Tresa Pollock, présidente du département des matériaux de l’UCSB. « C’est la grande prêtresse des matériaux de structure », résume la post-doctorante, titulaire de deux masters de l’Ecole nationale supérieure des Mines de Saint-Etienne et des Mines ParisTech. Deux semaines après sa présentation, la jeune chercheuse reçoit une offre d’emploi de Tresa Pollock en personne pour travailler à l’UCSB.
Pour celle qui a toujours rêvé de traverser l’Atlantique, pas d’hésitation. Deux mois après avoir soutenu sa thèse en décembre, elle s’envole pour la Californie. « J’avais toutes mes affaires en France, mon appartement etc. J’ai tout vendu. J’ai sauté dans l’avion avec deux valises. »
Il a cependant fallu près de quatre mois à la musicienne pour trouver un piano qui lui convienne. « Je suis très difficile », avoue-t-elle. Quatre mois et 30 magasins de musique plus tard, elle trouve finalement le Yamaha C2 qu’elle recherchait – un piano électronique pour éviter de déranger les voisins. Sans visage s’illumine : « Avec ma location-vente, il sera à moi dans trois ans ! »
Avec son visa universitaire J-1, impossible cependant de recevoir des cachets pour ses concerts. Marie-Agathe Charpagne refuse de renoncer à sa carrière de pianiste. « En grandissant en France, j’ai toujours eu l’impression que les gens essayaient de me mettre dans une boite », raconte cette fille unique originaire de Bourges.
« Pendant un moment, c’était un peu traumatisant. Quand on arrive à l’adolescence et qu’on se dit : qu’est-ce que je vais faire ? Je ne suis pas normale. Et puis, je me suis rendue compte que je ne rentrais pas dans une boite. Je ne rentrais pas non plus dans deux. Je me suis dit : pas grave, on va casser les boites ! », poursuit la chercheuse- concertiste.
Son secret ? « Garder le même rythme, confie-t-elle. On ne fait pas de la recherche pour l’argent ou la gloire. On le fait parce que c’est une passion. Donc on ne compte pas les heures », explique l’artiste, qui passe dix à douze heures par jour dans son laboratoire, avant de pratiquer le piano entre deux et trois heures le soir. Elle sourit : « Heureusement, je n’ai pas besoin de dormir beaucoup. »
Marie-Agathe Charpagne, une pianiste en blouse blanche à Santa Barbara
Par Capucine Moulas / Le 23 mai 2018 / Actualité
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